Amour Mort Corps Nu
Je suis très surpris que les hommes ne voient pas dans la nudité d’abord la mort, mais l’amour.
Ne voient-ils pas dans le baiser le fond du crâne,
dans le pénis l’artère qu’on peut trancher ?
(quant à moi je suis surpris toujours qu’il en jaillisse du sperme et non du sang comme il serait naturel)
dans la cuisse l’amputation ?
dans le cheveu l’odeur du porc grillé ?
dans le corps entier son écorché ?
dans la main la prothèse ?
le ventre la pourriture fécale ?
la nuque la hache ?
les hanches le trou fémoral ?
le buste les poumons éclatés contre le pare-brise ?
l’anus le pal ou la merde au choix ?
Quant à moi je ne peux faire autrement. Quelle admirable volonté d’ignorance l’homme n’exerce-t-il pas envers non la mort mais le fait inéluctable du mortel dans le vivant. Il ignore sa matière superbement, il la circonscrit avec des mots. Il chie des mots pour oublier non sa merde mais que merde il est, temporairement vivante, asticotée par la mort.
Jean-Michel Rabeux
Les Charmilles et les morts
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